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Le blog de mademoisellepioupiou
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Tempête à la Bergerie  1ère  partie

Tempête à la Bergerie 1ère partie

Tempête à la Bergerie  1ère  partie

Préambule

L’écriture de cette nouvelle de l’avent est partie d’un défi twitter avec @MadameLeJuge on avait voulu vous offrir chacune, un calendrier de l’avent spécial vous offrant chaque jour un épisode de nos #NouvelleDeLAvent qui devaient respecter les codes des fameux films de Noël.

La mienne n’avait pas pour vocation d’être retranscrite en un billet du blog mais je me suis laissée convaincre à la demande de plusieurs d’entre vous et voilà les milliers de tweets compilés en épisodes, un par jour durant les 25 jours d’un calendrier de l’avent.

 

Chapitre 1# de la #NouvelleDeLavent

 

Manon serrait le col de son manteau contre son cou comme si ça pouvait l’aider à passer entre les gouttes, la tête dans les épaules elle parcourait rapidement les derniers mètres qui séparaient son cabinet de son appartement douillet.

La journée avait été pénible, elle avait commencé par le café renversé sur le courrier de la veille qu’elle n’avait pas eu le temps de lire et qui patienterait encore, puis le mal de pied au bout de 100 mètres dans ses nouvelles chaussures si jolies mais pas très confortables

Et enfin le message vocal en sortant du bus lui indiquant que son associée était couchée avec une fièvre de cheval et ne pourrait pas venir travailler aujourd’hui, elle allait devoir jongler entre les patients…ca promettait une journée bien compliquée.

Manon était une jeune médecin de 30 ans qui venait de s’installer avec son amie de fac dans un quartier pittoresque de Lille, avec l’héritage de ses parents elle avait pu acheter un grand local professionnel dans lequel elles exerçaient  toute les deux.

Elle hâtait le pas, elle était pressée d’éponger sa longue chevelure mouillée par la pluie et de reléguer au fond du placard ses chaussures neuves que jamais elle ne reporterait !

En ouvrant la lourde porte de son appartement, elle se voyait déjà dans son grand canapé face à la cheminée allumée,  profitant de sa bière fraiche et d’un bout de saucisson qu’elle partagerait avec Angus le rouge son grand chat rouquin et angora au regard tendre et orange.

En route, elle avait pris le temps de se commander une pizza pour échapper à la corvée de la préparation d’un diner qu’elle aurait immanquablement brulé.

Pour l’instant elle savourait le plaisir de ne rien faire en regardant à la télé le morne bulletin météo de ce mois d’octobre 2020 dans les Hauts de France.

La crise sanitaire avait nivelé les désirs des gens, un bon plat au chaud, des amis à portée de voix... de toute la journée elle n’avait eu le temps d’appeler son amie Cindy, pour se faire pardonner elle lui avait fait livrer de la pâtisserie dont son associée était si friande.

Cindy était retournée chez ses parents depuis quelques mois le temps que sa patientèle se développe et lui permette d’assumer sa part des charges de leur cabinet et le location d’un appartement. Elle avait dû être chouchoutée par sa maman toute la journée.

Souvent Manon allait puiser dans la famille de son associée cette chaleur familiale qui lui faisait tant défaut depuis le décès de ses parents suivi de près par celui de sa seule grand-mère rongée de ne s’être jamais vraiment réconciliée avec les parents de Manon.

Les décès successifs de ses parents et de sa grand-mère l’avaient laissée seule au monde mais à l’abri du besoin alors en à peine deux ans elle avait pu se créer un cabinet que beaucoup lui envieraient.

C’est à ce moment de ses pensées du soir que la sonnette du parlophone a retenti annonçant la livraison d’une pizza réconfortante.

Les bras chargés du carton odorant de la pizza, elle attrape au passage dans l’entrée ce courrier qui traine sur son vide poche depuis deux jours. Après avoir engouffré sans respirer ou presque deux parts de pizza, elle écoute les derniers messages de Romain son amoureux phobique de l’engagement  qui commençait à comprendre que Manon n’avait pas le pardon facile à l’instar du reste de sa famille.

C’est ainsi que sa lourde chevelure enroulée dans une serviette éponge, enfouie dans un peignoir douillet et les doigts tachés de sauce tomate que Manon entreprend d’ouvrir son courrier. Son regard est attiré par une enveloppe provenant de son notaire niçois, c’est peut-être des nouvelles de la vente de la bastide familiale qu’elle a confié à ce jeune et fringuant notaire fils d’un lointain cousin de son père. Elle lit les mots du notaire mais peine à comprendre ce que ça lui apprend, elle pose la lettre, boit une longue gorgée de sa bière et reprend sa lecture en tremblant … Une demi-sœur de sa grand-mère serait morte sans autre héritier que Manon, son notaire contacté par 1 confrère chargé de la succession, lui demandait de descendre au plus vite dans le sud de la France pour voir ce qu'elle comporte terres, grande bergerie dans la montagne etc...

Cette étrange découverte la ramène à sa propre histoire. Les parents de Manon étaient morts  tous les deux dans un accident de voiture,  un soir d’hiver en rentrant dans leur maison quelques mois avant qu’elle ne prête serment...

Ils avaient quitté leur sud natal pour s’installer dans la campagne lilloise dans les années 90 à l’occasion d’une double mutation dans un lycée prestigieux, ce déménagement avait créé une brèche dans la famille. Les grands parents respectifs avaient vécu cette mutation comme une trahison, Manon était bébé et rien ne comblerait cette blessure pas même les retours à chaque vacances scolaires dans la bastide familiale en haut d’une colline niçoise.

Honorine, veuve depuis des décennies, était furieuse que sa fille ait emporté sa seule petite fille si loin d’elle, elle s’est éteinte seule peu après l’accident, dans le chagrin de n’avoir jamais vraiment pardonnée à sa fille d’être partie.

Les grands-parents paternels de Manon s’en étaient également allés quelques années après le déménagement de leur fils unique avec sa famille.

Manon si jeune était cernée par les deuils et ça l’avait contrainte à se réfugier derrière une carapace de froideur dont seul ses intimes savaient qu’elle n’était qu’apparence.

En réalité, elle rêvait de ces grandes tablées de familles ou chacun parle fort et plaisante en rappelant les anecdotes du passé.

Demain matin, elle appellerait le jeune notaire pour vérifier s’il ne serait possible d’échapper à ce déplacement dans le sud de la France trop perturbateur à plus d’un titre. Elle n’avait plus remis les pieds dans la bastide familiale aux fameuses persiennes mi closes l’été quand chantent les cigales.

Il y avait là-bas trop de toutes ces personnes dont le deuil la blessait. Elle se rappelait ses premiers pas sur la tomette de la cuisine de sa grand-mère, le potager dans lequel elle allait cueillir avec Honorine fruits et légumes, le vaste salon dont le silence était rythmé par les tic tac de la pendule en bois d’olivier, les éclats de rire de sa mère quand elle lui apprenait à nager dans le grand bassin à la mosaïque émeraude, l’odeur de poisson du matériel de pêche de son père dans la remise, celle de lavande des armoires de sa grand-mère...

Tout ça lui faisait tellement mal qu’elle avait choisi de tout vendre au plus vite pour oublier ces bonheurs-là. Revenir là-bas, c’était devoir affronter sa peine et risquer de fendiller sa carapace protectrice, sa vie était désormais ici.

Elle devait oublier ces temps joyeux révolus avec cette famille qui l’avait quittée, abandonnée, pour se consacrer à la famille qu’elle se construisait dans le nord de la France.

Repue et l’esprit bouillonnant elle décide d’aller se coucher dans son vaste lit bien chaud suivie de près par le gros matou qui veille sur elle. Son téléphone ne cessait de vibrer des notifications des messages de Romain.

 Il alternait les déclarations romantiques et les propositions sensuelles essayant de la faire revenir à de meilleurs sentiments. Si Manon avait encore en mémoire leur dernière nuit d’amour, elle ne parvenait pas à oublier l’ultime dérobade de Romain, celle de trop qui après l’avoir fait monter au septième ciel plusieurs fois lui avait avoué en un murmure qu’il ne serait pas là pour Noël qu’il allait surfer avec ses copains à Val d’Isère et qu’il était désolé de lui faire faux bond.

Ce serait le 3ème Noël sans sa famille et pour une fois elle aurait bien voulu refuser l’invitation de la famille de Cindy pour faire un réveillon tous les deux devant leur sapin et un bon feu de cheminée, elle avait besoin de ça pour construire sa vie autour de ce renouveau.

Il ne voulait pas le comprendre ou plutôt le comprenait trop bien, Romain était fuyant, il s’ingéniait à fuir les rendez-vous familiaux habituels, n’était jamais là pour les fêtes, les anniversaires, les invitations à dîner, les crémaillères, les mariages, les baptêmes. Il faisait tout pour que leur couple reste si ce n’est dans une semi-clandestinité, dans une intimité très privée.

Tout juste s’il avait accepté de participer à une dînette de fin de chantier avec Cindy quand elles avaient achevé les menus travaux de rénovation de l’appartement de Manon, jusqu’au dernier moment elle avait craint qu’il ne trouve une excuse. A cette occasion elle l’avait prévenu, elle n’accepterait plus les dérobades de Romain et lui avait dit qu’elle ne manquait pas de prétendants et qu’elle avait bien tort de réserver ses sentiments pour un éternel absent.

Cette fuite en avant de Romain ne l’empêchait pas régulièrement de lui faire des crises de jalousie quand elle avait commencé à sortir sans lui et parfois se faire accompagner d’un ami. Cet imbécile avait pris l’habitude de la rejoindre tard dans la nuit pour lui faire l’amour fougueusement la conduisant au bord du paroxysme plusieurs fois comme pour lui rappeler que leur puissante alchimie.

Il est vrai que dès qu'il la touchait ou la regardait, de la lave en feu coulait dans ses veines, elle oubliait toutes ses réserves, leurs corps s'alliaient à merveille sans retenue et sans tabou jusqu'à ce que sans force et trempés de sueur, ils retombent sur les draps froissés. Le corps de l'autre étaient un instrument fait à la mesure de chacun et leurs chevauchées torrides les laissaient sans force ni volonté au petit jour de leurs nuits animales.

Ils s'étaient découverts par hasard au cours d'une de ces soirées étudiantes endiablées et dès le départ tout avait été électrique entre eux, dès leur premier rapport debout et haletants contre un mur sombre. C'était certainement ce qui effrayait le plus Romain, cette emprise des sens qu'exerçait ce petit bout de femme sur lui si attaché à sa liberté.

Mais c’était fini, Manon ne voulait plus succomber à ce système malsain qui faisait d’elle une jeune femme esseulée et malheureuse la plupart du temps, elle  avait désormais les yeux grands ouverts en quête d’un homme qui serait un vrai partenaire si ce n’est pour la vie pour une vie sociale sans verrou.

En attendant, cette période d’abstinence lui pesait au plus haut point puisqu’elle en était rendue à flirter avec le livreur de pizza, un classique dans le cinéma X mais un première dans la vie de cette jeune femme d’habitude réservée. Tout à l'heure en allant récupérer sa pizza elle avait été troublée.

Elle se remémorait la scène, à la porte la sonnerie retentissait,  ce devait être William, le jeune livreur du pizzaiolo du quartier, qui lui apportait la gigantesque reine qu’elle avait commandée avec supplément ail, aubergine et poivron comme d’habitude.

Elle avait ouvert la porte le nez plongé dans son grand sac à la recherche de son porte-monnaie pour tendre à William son billet de 10 euros augmenté d’un pourboire et se retrouvait face à un inconnu.

-Tiens Wil.…

-Non ce n’est pas William, je suis son grand frère Hugues, je le remplace il est malade, son patron avait besoin d’un remplacement en urgence alors je me suis proposé, pardon de vous avoir fait peur, c’était involontaire.

Le jeune adolescent boutonneux avait été agréablement remplacé par un beau jeune homme au regard de la couleur des mers du sud, c’était juste la vision qui lui fallait pour se réconforter de cette journée pénible. C’est à regret qu’elle avait refermé sa porte blindée sur le beau livreur dont elle aurait bien fait son dessert en d’autres circonstances.

Il devenait urgent qu'elle se choisisse un autre amant avant de succomber à ses pulsions sensuelles. D'autant que Romain continuait à la tenter pour la faire céder à sa volonté, il s'était rendu compte un peu tard que finalement il n'était pas du bon côté de la cognée et qu'il allait tout perdre. C’est ainsi qu’écartant les sextos et selfies enjôleurs de Romain et occultant le désir qui naissait au creux de ses reins, elle allait tenter de s'endormir dans ce tourbillon d'émotions...

 

 

#Chapitre2  #NouvelleDeLavent

 

Au réveil d’un sommeil agité de ses fantômes, Manon s’extirpe avec difficulté de son lit pour commencer cette journée pleine de promesses.

Sous la douche, elle rafraichit son corps encore brûlant des désirs agités par les messages de Romain.

En sortant de la salle de bain et attrapant son téléphone, elle constate que son associée la prévient de son retour au cabinet cet après-midi, les choses allaient redevenir normales, restait juste à se débarrasser de la corvée de cette nouvelle succession qui s’ouvrait, est ce que ça valait le coup d’accepter, est ce qu’il fallait faire l’effort de descendre, est ce qu’elle pourrait s’absenter ?

En y réfléchissant, ça pourrait être intéressant de descendre dans le Sud pour constater de visu la valeur de cette succession et pourquoi la vente de la bastide tardait tant. Elles en avaient justement parlé avec Cindy la semaine dernière car le grand appartement sur le même palier que leur cabinet se libérait et qu’il serait peut être possible de l’acheter et de constituer une maison de santé accueillant plusieurs métiers médicaux et para médicaux. Le projet était alléchant, elles connaissaient déjà un kiné, une gynécologue, une infirmière et un psychologue qui seraient ravis de se joindre à elles, grâce à cette superficie supplémentaire elles pourraient accueillir tout le monde ! Manon se promettait d’étudier la question avant de rejeter en bloc la demande du notaire mais pour l’instant elle marchait vers une longue journée de rendez-vous. Quelques heures plus tard, en dévorant un bagel au saumon résonnait encore dans ses oreilles l’écho de la voix du notaire lui précisant que le patrimoine successoral était plus qu’intéressant, qu’il comportait terres, bâtiments, portefeuille d’actions et assurances vies, que le tout dépassait et de loin la valeur de la succession de sa grand-mère. Il devait lui envoyer une première liste des biens et valeurs transmises. D’ailleurs le notaire lui avait révélé que la tante  avait même prévu le financement des droits de la succession. Tout cela était très perturbant, se déplacer au pire moment de l'année celui des épidémies de gastro et de grippe, bien que les précautions sanitaires de la COVID les ai considérablement réduites, se plonger dans cette histoire familiale secrète alors qu'elle essaie d'oublier.

 Bousculer ce train-train quotidien qui la protège de ses noires pensées d'orpheline...mais d'1 autre côté, s'en éloigner pourrait la distraire de cette rupture avec Romain, accélérer la vente de la bastide qui jusque-là était le dernier ancrage douloureux avec sa famille disparue. Manon attendait avec impatience l’arrivée de son associée pour lui en parler et écouter son avis, quoiqu’il en soit organiser son absence du cabinet à cette époque de l’année allait être un sacré challenge. Heureusement sans confinement sanitaire le voyage serait plus simple.

La décision avait finalement été prise, elle irait voir ce qu'était cette succession et règlerait la question et celle de la bastide...

Dans l’avion pour Nice elle révisait les différentes étapes de son séjour, en premier elle allait directement chez le notaire, puis elle irait passer une première nuit dans la bastide que la fidèle Fanny aurait chauffée et ravitaillée pour l’arrivée de Manon. Le lendemain elle irait visiter le domaine dont la tante lui faisait don puis retour chez le notaire pour accepter le cas échéant cette succession sous bénéfice d’inventaire. Puis un rendez-vous avec l’agent immobilier pour décider quoi faire pour hâter la vente de la bastide et le lendemain retour chez elle à Lille pour reprendre le cours de sa vie. Trois jours bien remplis rien de plus pour ne pas se laisser aller à une nostalgie morose.

En sortant de l’avion Manon se dit que la température niçoise s’est presque alignée sur les frimas du Nord, le ciel est gris et il fait froid, elle n'est pas dépaysée et ça tombe bien ça l'éloigne de ses souvenirs.

Longeant la Baie des Anges jusqu’au centre-ville, Manon est contrainte de reconnaitre que ce bord de mer fait battre son cœur même par temps maussade, même après si longtemps.

Arrivée près de la zone piétonne, c'est sous les rayons d'un soleil timide qu'elle s'engouffre dans l'immeuble de l'étude, trainant derrière elle son sac de voyage dont les roulettes glissent sur le hall du marbre.

Félicien, toujours aussi séduisant, son cousin notaire l’accueille chaleureusement malgré ces distances sanitaires que l’on doit tous respecter et l'installe dans son bureau pour lui faire découvrir les détails de cette succession surprise. Apparemment son arrière-grand-père maternel avait succombé aux charmes clandestins d'une lavandière piémontaise desquels était née Rose, la demie sœur de sa grand-mère, culpabilisant de ne pouvoir l'élever au grand jour, son père avait pourvu à l'établir confortablement. Elle avait mené une vie paisible auprès d'un mari décédé bien avant elle et dont elle n'avait pas eu d'enfant, quelle funeste destinée pour cette grande tante qui a grandie sans père et vieillie sans mari... Ce qui la rapprochait curieusement de la vie de cette petite nièce qu'elle n'avait jamais pu connaitre et à qui elle léguait tout ce qu'elle avait.

Sa silhouette athlétique du jeune notaire était baignée de la lumière par-delà les lourdes tentures de son bureau et  laissais deviner un corps musclé, il était encore doré à souhait et la pratique du bateau avait collé des reflets auburn dans sa chevelure foncée, il avait les yeux de braise hérités de quelques aïeux sardes de la famille du père de Manon. C’était un bel homme et Manon n’était pas insensible à son charme malgré leur lointain cousinage.

Elle se laissait trop distraire par les picotis qui lui parcourait l’échine lui rappelant que sa récente rupture avec Romain l’avait laissé avide de sensualité trop longtemps inassouvie. Heureusement pour elle, Félicien venait de lui dire que son clerc lui remettrait une synthèse de toutes ses informations car elle n'avait rien retenu de ce qu'il lui avait dit.

En attendant ses yeux s’attardaient sur le contour des mains longues du notaire, elles semblaient calibrées pour les caresses, Manon ne pouvait s’empêcher d’imaginer les mains de ce cousin parcourant son corps privé de plaisir charnel depuis plusieurs longues semaines. Plus elle y pensait, plus les mains du notaire s’alourdissait sur elles, devenaient plus exploratrices, plus inquisitrices semant derrières elles des vagues de chaleur sur Manon. Si le jeu de ces mains était virtuel, en revanche la montée du désir de Manon était bien réel, les frissons du creux de ses reins la faisait onduler sur son siège, captive de la caresse intime que ça lui procurait et qui irait crescendo jusqu’à une explosion déplacée en ses lieux feutrés et solennels… Félicien totalement inconscient de ce qui se déroulait sous ses yeux, lui proposait de la conduire sur les lieux du domaine pour qu’elle puisse se rendre compte par elle-même. Mais avant cela il lui donnait rendez-vous à midi, il irait déjeuner au soleil qui s’était enfin levé et à deux pas de l'étude sur la zone piétonne. Se levant pour la raccompagner à la porte de l’étude, Manon pu apprécier la courbure prometteuse des reins de son cousin, heureusement un peu dissimulée sous sa veste, il était temps qu’elle s’éloigne un peu avant qu’elle ne soit complètement liquéfiée.

En attendant l'heure du déjeuner elle ferait quelques courses dans le carré d’or de la ville avant qu’ils ne se rejoignent pour manger sur le pouce, que lui arrivait-il, qu’est ce qui faisait qu’elle était la proie de ses plus bas instincts ?

Sans vraiment y réfléchir, Manon se dirigeait vers un magasin de lingerie fine. Essayant un ensemble gris et rouge qui serait du plus bel effet sous ce chemisier en soie rouge qu’elle avait repéré dans la boutique voisine. Ils viendraient compléter les tenues plus sport et de montagne qu’elle avait mis dans le sac de voyage laissé à l’étude de son cousin, une fois la visite du domaine faite, Félicien avait proposé de la raccompagner en fin de journée à la bastide de Gairaut.

Pour l’instant en ballerines et jean, blottie au creux de son long manteau en cachemire, elle savourait un thé chaud au soleil de la place Magenta à deux pas de l’étude, contemplant ses achats, un ensemble de sous vêtement, un chemisier en soie, un gros pull à col roulé. En farfouillant dans ses emplettes, elle réalisait qu’elle avait avec ses courses « glamourisé » le contenu de son sac de voyage et ça n’était certainement pas sans arrières pensées, une petite coquine avait pris le dessus sur la jeune doctoresse raisonnable.

Elle se sentait prête à faire des folies loin de son quotidien et du regard des siens. Cette escapade se révélait être finalement plus aventureuse que prévue...jusqu'où ça pourrait la mener ?

 

 

#Chapitre3 #NouvelleDeLavent

Après ce bref déjeuner su soleil, les voilà en route pour la propriété de la grande tante, Manon a juste échangé ses ballerines contre des bottes fourrées, enfilé le gros pull en cachemire qu’elle vient d’acheter, et revêtue sa grosse doudoune en duvet. Lorsqu’ils ont rejoint la voiture de Félicien,  ils se sont frôlés accroissant le malaise ressenti par Manon, elle a senti la douce effusion discrète de son eau de toilette, c’est une odeur qu’elle connait mais laquelle ?

Sagement installée côté passager du gros véhicule tous terrains de son cousin, elle n’ose lui dire qu’elle risque de somnoler pour éviter d’être malade en voiture,  sa voix la berce et elle se sent glisser doucement vers le sommeil. Le bruit des freins et de l’alerte sonore d’ouverture de porte de la voiture la tire de sa sieste et elle réalise qu’ils sont arrivés à la Bergerie, qui est bien plus grande qu’elle ne l’imaginait.

Félicien a récupéré un lourd trousseau de clefs hétéroclites  et s’apprête à ouvrir la grosse porte en bois de la bâtisse devant laquelle il s'est arrêté. Manon sort de la voiture en frissonnant car le froid est vif, elle récupère sa doudoune en plumes et rejoins Félicien pour s’engouffrer à sa suite dans le vaste bâtiment en pierre et en bois. Au passage elle a remarqué cette curieuse toiture dont les deux pans descendent presque jusqu’au sol, certainement pour que la neige ne s’accumule pas trop dessus. D'un côté un gros chat angora noir y trône sur un tas de bois bien rangé, immobile, il est aussi noir que son #Angus est roux, être accueillie par un chat est toujours de bonne augure pour la jeune femme.

A l’intérieur tout est figé, ça sent bon la cire et le bois, dans la cheminée le reste des braises de la dernière flambée de la propriétaire, au rez de chaussé un vaste espace comprenant salon cuisine et une salle de bain complète, au premier 4 chambres dont une très grande avec vue sur les sommets environnants, toutes avec salle de bains. Manon ne s’attendait pas à tant de luxe pour une bâtisse de montagne !

Au-dessus encore, après une porte bien calfeutrée, un étage de combles dans lesquels s’entassent des meubles et des malles.

Tout semble si paisible, on a peine à imaginer que la maitresse de maison ne va pas rentrer d’un instant à l’autre.

L’atmosphère se réchauffe en un rien de temps, Félicien lui explique que la vaste cheminée séparant en partie la cuisine du reste de la pièce est équipée d’un réseau propageant l’air chaud le long des murs des pièces supérieures, un grand poêle à bois pour cuisiner puis deux autres dans le salon, suffisent à restituer un air chaud et doux qui se répand dans la bergerie.

Félicien lui indique que la maison est flanquée d’une vaste remise comportant un sellier et la réserve de bois, une voiture et un atelier de bricolage, la bergerie semble être prête à l’emménagement, elle pourra certainement la vendre très facilement.

Tout en explorant les détails de cette grande salle qui paradoxalement est la version plus rustique du salon de sa grand-mère à la Bastide, Manon perçoit la nervosité de Félicien :

Sur la grande table de ferme, il a étalé des plans et des documents, il semble attendre quelqu’un.

-On attend quelqu’un ?

-Oui j’ai donné rendez-vous au berger de ta grande tante pour qu’il nous guide sur la partie basse de la propriété pour laquelle je n’ai qu’un plan de cadastre nettement insuffisant pour se repérer. Je ne comprends pas ce qui le retient, il devrait être là depuis 30 minutes.

-Ahh, qu’est-ce que disent les papiers de la succession, il y a quand même une superficie ?

- Oui bien sûr, il est indiqué que la propriété  est de 15 hectares je crois…

-15 hectares ? Mais c’est gigantesque !

- Oui 15 hectares, dont une partie déborde sur l’Italie

-Ahh et je suppose que ça va compliquer les choses ?

- Un petit peu mais rien d’insurmontable, ça va juste ralentir le règlement de la succession mais d’ici 6 mois un an ça devrait être bouclé…

- Un an ? Mais ça n’est pas possible ça un an !

-Tu sais il y a beaucoup de décisions à prendre, en plus de ce problème italien…il y a la fromagerie, la scierie, les salariés, le troupeau, les bois, les actions…

-Comment ? Mais tu ne m’avais pas parlé des employés et des bêtes, qui s’occupe de tout ça depuis le décès de Rose ?

- Je t’en ai parlé ce matin…tu n’as pas du comprendre… c’est pour ça que j’ai donné rendez-vous au berger de Rose, c’était semble-t-il son homme de confiance, il s’occupe de tout et connait le domaine mieux que tout le monde, je ne sais pas ce qu’il fait mais sans lui notre visite va tourner court. Moi je ne vais pas pouvoir l’attendre très longtemps j’ai une signature très importante ce soir, dit-il en se retournant sur Manon. Manon sent une tension dans la voix de Félicien :

-Tu ne veux pas dire que moi je dois rester ici tout de même ? Tu devais me conduire à la Bastide de mamie ce soir, je ne vais pas rester seule ici, loin de tout ?

-Et bien je ne sais pas quoi te dire, sinon on devra revenir, reprogrammer un rendez-vous et revenir dans la semaine…

-Ah mais non, je ne compte pas trop m’attarder, je voulais rentrer dans deux jours maximum, tu as essayé de le joindre ?

-Je l’ai appelé en arrivant et je l’ai rappelé en allant chercher le bois, je tombe à chaque fois sur sa messagerie, il doit y avoir un problème. Mais tu sais au pire, j’ai vu dans la remise le 4x4 de ta grande tante, je vais voir s’il roule et je reviens, comme ça tu pourrais voir directement avec le berger quand il arrivera puis rentrer avec cette voiture ou rester et moi je remonterais dès que possible pour recueillir les dernières informations et ton avis, il y a tout le confort ici, il parait même que la maison est équipée d’internet.

-Pfff, c’est pas du tout ce que j’avais prévu…

-Regarde les placards sont pleins il y a des congélateurs au sellier je suis sûr qu’ils sont bien garnis et  si j’ai bien compris à quelques centaines de mètres, il y a la fromagerie avec la réserve à affinage, on va aller voir, ne bouge pas je fais démarrer la voiture pour vérifier, la faire tourner et on y va ça rechargera la batterie en plus.

Il est déjà dehors, pour lui tout est simple mais pour elle rester dans cette maison inconnue en pleine montagne comme ça est loin de tout ce qu’elle avait imaginé de cette visite, pourtant cette maison dans laquelle, elle n’avait jamais mis les pieds lui semblait bizarrement familière.

-Regarde qui je viens de trouver ? C’est pas le berger mais il te tiendra compagnie en attendant dit il en laissant entrer le gros chat noir, la voiture a démarré au 1/4 de tour, on va un peu rouler pour s’assurer que la batterie est pleine et ne va pas te lâcher en cas de besoin.

Le chat se précipite sans hésitation sur un des fauteuils qui semble être le sien vu son empressement à s’y installer, Manon est interloquée par l’attitude de Félicien, pour lui c’est déjà décidé, elle reste et il repart… tout d’un coup ce grand corps qui lui semblait si attirant ce matin dans les rayons du soleil avait perdu tout intérêt, il l’abandonnait …lui aussi.

Félicien l’entraine dans cette vaste remise, dans laquelle elle distingue dans un coin une vielle Toyota qui ronronne.

Les voilà partis sur une piste qui mène à un bâtiment visible de là, arrivés sur place, Félicien sort encore le gros trousseau, avec toutes ses clefs étiquetées et ouvre la porte, la forte odeur de fromage envahie les narines de Manon qui espère que quelqu’un s’est occupé de la fromagerie depuis le décès de Rose.

Tout est impeccable, un bref coup d’œil à l’installation révèle que la fromagerie a du continuer à fonctionner et dans une petite pièce attenante à l’atelier et la salle des cuves, la réserve d’affinage, Félicien prélève au passage 3 fromages qu’il pose sur une cagette en plastique :

-Bon et bien voilà de quoi se restaurer déjà, il y a du pain, de la viande et des légumes dans le congélateur, tu ne vas pas mourir de faim ce soir.

-Oui, enfin ça n’est pas le plus important…

La piste se continue vers un bois mais Félicien estime plus sage de ne pas trop s’éloigner de la maison alors qu’il commence à pleuvoir, il bifurque pour retourner à la Bergerie et la contourner jusqu’à une immense grange  à l’intérieur de laquelle sont installées des étables et une réserve de fourrage.

Au fur à mesure du temps qui passe, Manon se sent de plus en plus en confiance dans ces lieux inconnus. Elle va rester, c’est ce qui lui permettra de perdre le moins de temps possible, sans surprise de dernière minute, elle pense accepter cette succession qui va certainement changer le cours de sa vie qu’elle a déjà hâte de retrouver.

De retour, dans la grande maison, elle est surprise de la vitesse à laquelle celle-ci s’est réchauffée, entre chaleur et lumière elle est contre toute attente très accueillante, finalement ça ne serait peut-être pas si pénible d’y passer un jour ou deux, oui d’une nuit elle s’était déjà résolue à y rester quelques jours.

Il lui fallait prévenir Fanny qu’elle ne rentrerait pas à la Bastide ce soir et Cindy que son voyage risquait de durer plus longtemps… -Ne t’inquiète pas, ça va bien se passer, Monsieur Gatti va finir par arriver et tout t’expliquer, moi je me débrouille pour remontrer d’ici après demain, tiens regarde à côté de la grange, j’ai même trouvé un poulailler avec des œufs tout frais ils sont encore chauds, ils viennent d’être pondus. Tu viens on regarde ce que tu peux sortir des congélateurs pour ton dîner.

-Ah d’accord, on en est déjà au fait que je dîne ici, que je ne rentre pas ce soir .

-…

Manon se résigne et toute à ses pensées tape dans les réserves de cette grande tante disparue et rapporte deux morceaux de viande, ce qui ressemble à un gigot et un autre à un rôti. Elle a trouvé également quelques bocaux de légumes, des pommes de terre et quelques pommes.

Elle rit intérieurement de se retrouver à jouer malgré elle à la montagnarde dans cet environnement mystérieux.

Félicien et elle dépose ces trésors sur le comptoir de la cuisine avant de se préparer une collation, dehors la pluie a redoublé d’importance et Félicien apparaît pressé de repartir, il jette un coup d’œil à son téléphone et soupire.

-Pas de nouvelle du berger ?

-Non et puis le mauvais temps est annoncé sur toute la zone pour quelques jours je ferais bien de repartir avant de m’embourber sur la piste qui mène de la route à la maison, en plus le jour va tomber dans pas longtemps, tu es à l’abri ici. Crois-moi tu seras mieux là que sur la route ce soir avec moi…

L’écho de cette phrase s’était à peine envolé que la porte s’était refermée sur Félicien parti lui chercher son sac de voyage et sa mallette restés dans sa voiture.

Elle lui en voulait de l'abandonner ici mais n'avait pas le courage d'argumenter, elle allait rester. Manon prenait possession avec un peu d’appréhension des lieux dans lesquels elle resterait quelques jours  avant de prendre des décisions.

Et voilà, son sac de voyage au pied du lit de la grande chambre et le contenu de sa mallette étalé sur le petit bureau dans le salon, munis du code du wifi, Manon s’installait pour régler son absence des jours à venir.

En premier lieu prévenir Fanny : « Bonjour Fanny, je t’appelle pour te prévenir que je ne viendrais pas ce soir, je suis coincée en montagne dans la maison de la tante Rose, je vais devoir y rester quelques jours, c’est un bel endroit au-dessus de Sospel, ne t’inquiète pas, je te tiens au courant pour mon arrivée, je t’embrasse très fort et merci pour tout » elle devait être occupée Manon lui avait laissé un message, maintenant à Cindy.

Décidément personne n’était disponible, il est vrai qu’à cette heure-là en semaine tout le monde était occupé : « Cindy, bonne nouvelle cette succession est énorme, mauvaise nouvelle ça va prendre plus de temps que ce que j’aurais voulu. Décidément personne n’était disponible, il est vrai qu’à cette heure-là en semaine tout le monde était occupé : « Cindy, bonne nouvelle cette succession est énorme, mauvaise nouvelle ça va prendre plus de temps que ce que j’aurais voulu. Tout va bien mais j’ai été obligée de rester chez la Tante Rose en montagne, le notaire viendra me chercher dans deux jours, d’ici là j’aurais pris connaissance de tout ce que compose le domaine, sauf découverte de dettes cachées, je vais accepter la succession et voir si les avoirs ne pourrait pas permettre de verser un acompte pour l’achat de l’appartement pour agrandir le cabinet.

Bon je compte sur toi pour t’occuper d’Angus, au besoin, prends le chez tes parents de toutes façons il connait bien l’endroit il ne risque pas de se perdre.

Il y a internet et un téléphone fixe ici, je te le mets dans les commentaires pour le cas où tu voudrais me joindre, je te fais une vidéo et je te l’envoie, essaye de m’appeler en visio quand tu as un instant. J’ai bloqué Romain il risque de t’appeler d’ici quelques jours ne lui dit rien pour ici, dis-lui que je suis partie en vacances sous les tropiques qu’il me foute la paix. »

Voilà une bonne chose de faite, restait à paramétrer un message de réponse automatique aux mails entrants signalant son absence jusqu’à nouvel ordre en raison d’un déplacement professionnel, ça filtrerait une partie de ses interlocuteurs.

Voilà Manon n’avait plus qu’à prendre ses marques dans la maison en attendant que le berger daigne apparaitre et fournir les renseignements manquants. Manon pensait que le plus urgent était de prendre une décision sur les entreprises de manière à ne pas laisser trop longtemps les employés et les clients dans l’expectative, elle vendrait la fromagerie et la scierie en fonction de leurs chiffres d’affaire respectifs. Pour le reste un paysan voisin sera peut être intéressé par la bergerie, ses terre et ses troupeaux sinon il faudrait morceler le domaine et vendre les lots séparément.

N’étant pas très habituée à la cuisine au poêle à bois Manon sort deux lourdes marmites en fonte dans lesquelles cuisiner le rôti et le gigot en train de décongeler au coin du poêle, ça ne serait sans doute pas prêt pour ce soir, elle allait devoir se contenter d’un morceau de pain qu’elle avait sorti et du fromages des trois rapportés de la réserve d’affinage en espérant que Félicien avait bien choisi.

Au vu de la dérobade de ce dernier, ses ardeurs du matin s’étaient évaporées, fouillant dans son sac de voyage elle se rendait compte que la petite nuisette destinée à ses nuits à la Bastide serait insuffisante pour ici car elle éteindrait le feu en se couchant même si Félicien lui avait dit que la Bergerie était équipée d’alarmes incendie et CO2, mieux valait ne pas tenter le diable. Elle décide de se mettre en quête de quelque chose de plus chaud dans les armoires de la tante pour passer la nuit sans attraper la mort.

Equipée d’une liquette sans âge en flanelle, d’un leggins à elle, après avoir dévoré pains et fromage, Manon décide d’aller se coucher pour récupérer des dernières 24h harassantes, liseuse en main, elle se laisse tomber dans le grand lit de Rose en se rappelant qu’heureusement elle n’a pas rendu son dernier souffle ici, les draps sont tout propres, quelqu’un est venu faire le ménage mais qui ? Et puis le chat qui le nourrit ?

Dehors la pluie continue de tomber, Manon a à peine le temps d’entrevoir le museau du chat apparaître à la porte entrebâillée et le sentir grimper sur le lit, alors qu’elle sombre dans un sommeil qu’elle espère réparateur en éteignant la lumière.

(A suivre)